Sable

La plage est le principal espace naturel de Bernières. Cet espace fragile joue un rôle important pour protéger notre littoral d’une éventuelle submersion marine.

Comme le sable ne reste pas toujours sur la plage mais envahit parfois notre digue et les rues avoisinantes, certains berniérais pensent « Il y a trop de sable sur la plage ». D’autres s’interrogent sur le rapport éventuel entre la hauteur de sable et le risque de submersion marine.

Pour répondre à ces questions nous avons interrogé Franck Levoy, géologue spécialiste du trait de côte, chercheur au Centre de Recherches en Environnement Côtier de Luc, professeur à l’Université de Caen.

Quel est le rôle du sable sur la plage par rapport au trait de côte ?

« Avoir du sable sur une plage est tout à fait bénéfique pour la stabilité du trait de côte globalement et des ouvrages quand il y en a. Il faut donc faire en sorte que ce sable reste sur la haute plage afin qu’elle soit altimétriquement élevée le plus souvent possible, notamment avant une période tempétueuse. Avec une plage haute, la difficulté est parfois d’empêcher le transport du sable par le vent qui peut recouvrir les infrastructures situées en arrière.  Il est possible de le bloquer d’une manière ou d’une autre, selon l’ouvrage en présence. Certains brise-vents sont efficaces comme les ganivelles; après il faut voir le contexte pour adapter les solutions.

Plus la hauteur du sable est élevée sur la haute plage, plus cela réduira  la hauteur des vagues en diminuant la hauteur de la  tranche d’eau près du rivage (en relatif par rapport à une situation antérieure). La puissance  du déferlement sera alors réduite également. En réduisant la hauteur des vagues, on réduit aussi la hauteur atteinte par la projection de l’eau du déferlement juste devant lui, ce qu’on appelle le swash. Sur la côte du Calvados, c’est souvent cet effet du swash qui arrive à franchir  les ouvrages et à induire des submersions des terrains en contre bas en arrière du trait de côte ou en cuvette.

Plus le sable est haut mieux ce sera pour atténuer l’énergie des vagues, ce qui limitera la possibilité de franchissement de la mer au-dessus des ouvrages et donc les submersions. Les stratégies de protection visent parfois à apporter du sable sur la haute plage pour dissiper l’énergie des vagues.

Le passage d’engins qui nettoient les plages a pour effet « décompacter » le sable qui est plus facilement emporté par les courants marins induits par la dynamique des vagues très près du trait de côte. Il faut mieux limiter ces actions, notamment avant des périodes tempétueuses, car cela peut contribuer à l’érosion des plages même si seule la dynamique des vagues peut aussi grandement s’en charger. Ces actions peuvent donc être un facteur aggravant »

Comment la hauteur de sable varie-t-elle ?

« La hauteur du sable sur une plage, surtout sa partie haute, varie énormément, au jour le jour, et d’autant plus lors de conditions agitées en vives eaux. Toutefois, on observe souvent des  tendances évolutives, des phases de montées ou abaissements du sable qui suivent les saisons ou les régimes de vent spécifique au site : plus de vent de Sud-Ouest à Nord-Ouest l’hiver et de Nord à Nord-Est l’été,  ce qui induira des changements de niveau des plages, mais là aussi pour la météo il y a une grande variabilité selon les années.

D’autres facteurs agissent bien sûr, la présence d’ouvrages est un facteur qui peut favoriser l’érosion ou l’engraissement des hauts de plages, cela dépend du type d’ouvrages (épi, digue) et de leur conception. La part des choses entre facteurs naturels (vents, vagues) et anthropiques n’est pas simple à faire et demande des études souvent poussées sur la base de jeux de données de très bonne qualité. Concernant le rôle de la mer, dont le niveau moyen monte sensiblement depuis que les marégraphes existent, cela peut jouer, mais sur des échelles de temps de quelques dizaines d’années, c’est très difficile de percevoir son impact, masqué par les choses évoqués précédemment. Depuis la guerre, sur 75 ans, je ne pense pas que l’on puisse faire la part des choses. L’effet de la montée de la mer sur le trait de côte se perçoit par contre sur des échelles de temps de plusieurs centaines d’années, sans ambiguïté.

La côte du Calvados reste une côte assez stable dans son ensemble pour les parties sableuses. Il y a bien sûr quelques soucis d’érosion à quelques endroits, mais rien à voir avec la Manche ouest. Plus que la mer qui monte, on soupçonne une modification du régime des vagues aussi bien côté ouest Cotentin qu’en baie de Seine qui influence fortement l’évolution des zones sableuses.

Les changements de la hauteur des fonds s’observent un peu partout et sont moins bien connus sur les parties basses des estrans (accès plus difficile). Les causes peuvent également être multiples et parfois difficiles à préciser. La encore, il faut mener des analyses locales. Nous utilisons beaucoup les données Lidar aéroportées pour faire cela depuis 10 ans. »

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